«Moi mon but, c’était que les gens se sentent comme s’ils n’avaient jamais sorti de chez eux», lance l’ancienne propriétaire de la résidence Beauséjour de Bonaventure.

C’est à contre cœur que Lisa Bernatchez a mis la clé dans la porte de sa résidence pour aînés, le 1er janvier dernier. Faute de personnel et de relève, cette dernière s’est résignée à passer à autre chose. Les 9 résidents ont tous été relocalisés dans d’autres RPA de la Baie-des-Chaleurs.

«C’était du monde d’ici. Ils n’ont pas eu le choix de prendre quelque chose à l’extérieur», se désole-t-elle. «Je te dirais que les deux premiers mois ont été tough. J’aimais mon monde, j’aimais ce que je faisais. (…) C’est un gros métier et je comprenais quand les employés ne voulaient pas rester. (…) Je faisais tout, plus les soins que je donnais à mes clients. Ça vient lourd un moment donné», concède Lisa.

Lorsque la pandémie est arrivée, l’infirmière auxiliaire s’est rendue à l’évidence : elle ne pouvait plus tenir à bout de bras sa résidence.

«Si j’avais eu des problèmes dans ce temps-là, qui serait venu ? (…) J’ai eu des petits problèmes de santé et c’est mon mari qui devait venir me donner un petit coup de main ou ma fille. (…) Je pensais qu’il y a avait plus de monde comme moi qui aimait être avec les personnes âgées, pis ça n’a pas été le cas», souligne l’ex-gestionnaire.

Dans la dernière année, six résidences privées pour aînés ont fermé leurs portes en Gaspésie : deux dans chacune des MRC de la Haute-Gaspésie, Rocher-Percé et Bonaventure. C’est d’une diminution d’une quarantaine de places.

«Ca amène une pression supplémentaire à tous les gestionnaires. C’est complexe, il y a huit différents inspecteurs qui viennent, il y a des choses inutiles qui sont demandées. Il y a un manque d’employés et financièrement, on n’y arrive plus. Et les banques cognent à la porte pour te dire: si tu n’augmentes pas assez tes loyers, on va retirer ton prêt, faute de rentabilité», explique Marc Fortin, président-directeur-général du Regroupement québécois des résidences pour aînés.

Certaines RPA de la Baie-des-Chaleurs redoutent le ressac avec le retrait progressif de la prime de 4 dollars l’heure offerte aux préposés aux bénéficiaires, dès le 14 mai.

«Ça c’est final, ça va tuer plein de RPA! Et si ça ne les tuent pas pour qu’elles ferment, elles vont carrément arrêter les soins», croit M.Fortin, alors que les petites résidences de retraite ne peuvent offrir le même salaire et avantages sociaux que le système de santé québécois.

Par courriel, le CISSS de la Gaspésie répond «continuer de chercher des solutions pour augmenter le nombre de places disponibles. Des projets comme la construction de la Maison des Aînés et alternative de Rivière-au-Renard, l’agrandissement de CHSLD ou encore l’avènement de nouvelles RPA sont toutes des solutions qui pourraient combler une partie du besoin à venir.»