Chaque été, les Îles-de-la-Madeleine font rêver.

« On était trois couples qui voulaient aller aux Îles. Ce projet-là mijotait dans notre tête depuis au moins cinq ou six ans », lance d’emblée Maryse Bélanger, une résidente de Campbellton, au Nouveau-Brunswick, qui pensait avoir trouvé la maison de rêve pour passer ses vacances sur l’archipel.

Mais son rêve va se transformer en un véritable cauchemar, tout comme pour 7 autres personnes avec qui nous avons parlé. En novembre dernier, la Néo-Brunswickoise a débuté ses recherches en vue d’un séjour sur l’archipel l’été prochain.  Lorsqu’elle a constaté que la plupart des hébergements touristiques affichaient déjà complet, elle a alors tenté sa chance en publiant un message un groupe Facebook des îles-de-la-Madeleine, en espérant de dénicher quelque chose. Quelques heures plus tard, la présumée arnaqueuse est entrée en contact avec  elle par la messagerie privée de Messenger afin de lui proposer de lui louer sa maison du chemin des Caps, à Fatima.

« Grosso modo, en peut-être 5 heures, j’avais des nouvelles de quelqu’un qui voulait me louer sa maison.  Elle m’a envoyé des photos. Elle me disait que la maison était à Fatima sur le bord de l’eau et que les couchers de soleil sont extraordinaires », poursuit Mme Bélanger.

Après un bref échange, la locatrice lui demande un premier virement bancaire de 600$, ce qu’elle fera. Puis, quelques jours plus tard, un second dépôt est exigé, cette fois à la hauteur de 800$.

Selon nos informations,  la résidence de Fatima appartiendrait plutôt à l’ex-conjoint de la présumée fraudeuse et les deux seraient en mauvais termes.

« J’ai trouvé ça un peu bizarre, mais en même temps elle me disait que c’était difficile d’avoir des hébergements aux Îles, et si je voulais garantir mon hébergement, c’était la chose à faire.  Je n’ai pas été plus loin que ça. »

Et ce n’est pas tout, le mois dernier, la fausse locatrice lui demander de lui envoyer sans tarder 140$ pour payer la femme de ménage… même si le groupe n’a jamais encore mis les pieds sur l’archipel.

« C’était un vendredi soir. Elle me dit : ça presse, la femme de ménage risque d’annuler toutes mes réservations.  Elle avait besoin de cet argent là pour garantir son emploi cet été,  c’était plausible comme information » laisse tomber Mme Bélanger.

Mais coup de théâtre, le mois dernier, la madelinienne a envoyé un message à Mme Bélanger pour lui annoncer qu’elle a changé d’idée et qu’elle ne louerait plus sa maison. Elle lui propose plutôt de lui prêter son appartement.  Maryse Bélanger refuse cette proposition et demande d’être remboursée sur-le-champ. Depuis, elle est sans nouvelle.

« Depuis le début, mon mari disait qu’il trouvait ça louche. Je suis une personne pourtant très renseignée et très avisée et je me suis fait avoir », concède la sexagénaire.

« Elle m’avait dit en texto que j’avais trois mois pour canceller avant ma réservation pour peu importe la raison. J’ai toutes les preuves que j’ai envoyé à la SQ. Elle m’a dit: non, il n’est pas question, je ne te rembourse pas », lâche Éric Desbiens.

Le résident de la Rive-Sud de Montréal a envoyé 1000$ par virement bancaire pour garantir sa réservation durant les vacances de la construction. Mais lorsqu’il se désiste, après avoir décidé de se faire construire une maison sur un terrain qu’il a acheté, il a droit à des menaces de la  quinquagénaire.

« Quand je lui ai dit l’endroit où j’avais acheté un terrain, elle m’a dit: tu feras attention parce que j’ai bien des contacts aux Îles et ta maison tu vas avoir de la misère à la construire », affirme-t-il.

« Elle disait qu’on était vraiment chanceux parce qu’elle avait eu une annulation pendant cette période là. Elle a accepté les dates et tout allait bien. On a procédé un dépôt de 1000$ pour réserver la maison et qu’on fera le reste du paiement une fois sur place. Mais on s’entend que pour une semaine elle charge 1600$, un dépôt de 1000$ c’est plus que la moitié » fait remarquer Loïc Anctil-Bonenfant, qui attend lui aussi d’être remboursé.

C’est à la suite d’une publication Facebook d’Éric Desbiens sur le groupe  Info des Îles qui a fait en sorte que ce présumé stratagème frauduleux a pu être dévoilé au grand jour. Une dizaine de personnes qui sont tombées dans le piège l’ont d’ailleurs contactées.

« Ce que je souhaite, c’est qu’elle arrête de faire ça et qu’elle paie. Je sais que l’argent je ne l’aurais pas. Si j’avais pas mis cette publication là hier , il y a plein de monde qui se ferait avoir par elle », indique-t-il.

Des vacances qui tombent à l’eau? 

En plus de ne pas savoir s’ils reverront la couleur de leur argent, de nombreuses personnes, comme les membres de la famille de Loïc Anctil-Bonenfant, ne savent toujours pas s’ils pourront profiter des dunes et des plages des Îles-de-la-Madeleine.

« Il faut savoir aussi qu’on a déjà réservé le traversier pour deux voitures pis qu’il n’y a pas d’autres places pour juillet et août, c’est complet partout », indique le jeune homme dans la vingtaine.

Ce dernier se rendra tout de même travailler sur archipel situé au centre du golfe du Saint-Laurent, mais il ne sait pas si ses parents pourront venir le rejoindre.

« C’est sûr que ce n’est pas honnête surtout quand on fait des cris du cœur comme ça à une communauté qui est sensé être là pour s’entraider » souligne Loic, qui espère un revirement de situation.

Rien à se reprocher

Joint au téléphone, la fausse locatrice affirme qu’il s’agit d’un malentendu. Elle a nié catégoriquement tous les faits recueillis dans le cadre de cet article. Elle nous a jugé ne pas avoir de démêlés avec la justice ou les policiers. Pourtant, nos recherches ont permis d’apprendre que la présumée arnaqueuse est une habituée du palais de justice d’Havre-Aubert. Elle cumule de nombreux dossiers, dont en matière de violence, drogue, conduite de véhicule et de fraude.

« Ben non, absolument pas. On va s’organiser pour qu’ils puissent venir quand même. Ce n’est pas vrai du tout », s’est défendu la femme, que nous avons choisi de ne pas identifier.

Elle nous a assuré qu’elle remboursera les gens qui lui feront la demande.

Des plaintes formelles ont été déposées à la Sûreté du Québec.